Si c'est un homme || Primo Levi

Résumé : " On est volontiers persuadé d'avoir lu beaucoup de choses à propos de l'holocauste, on est convaincu d'en savoir au moins autant. Et, convenons-en avec une sincérité égale au sentiment de la honte, quelquefois, devant l'accumulation, on a envie de crier grâce.
C'est que l'on n'a pas encore entendu Levi analyser la nature complexe de l'état du malheur.
Peu l'ont prouvé aussi bien que Levi, qui a l'air de nous retenir par les basques au bord du menaçant oubli : si la littérature n'est pas écrite pour rappeler les morts aux vivants, elle n'est que futilité. "
Angelo Rinaldi.

Si c'est un homme est un livre que j'avais lu à 15 ans, lecture imposée en cours d'histoire ou de français je ne sais plus.
Mon grand père maternel était résistant, mes grands parents paternels ont vécu en zone occupée, et il n'était pas rare qu'en creusant dans leur jardin ou dans les champs environnant on trouvait des objets de guerre (couteaux, petits pistolets, et autres choses), et très souvent lors de sorties à la plage, on visitait les blockhaus abandonnés du bord de mer.
Bref j'ai toujours vécu dès toute petite dans une certaine réalité vis à vis de la seconde guerre mondiale, mais j'estime qu'à 15 ans je n'étais pas assez mature à ce sujet pour lire ce livre, ou du moins bien le comprendre.
C'est 12 ans après, avec beaucoup plus de connaissances sur cette période que j'ai eu envie de relire ce chef d'oeuvre. Car appelons un chat : un chat, Si c'est un homme est un chef d'oeuvre.

Primo Levi nous raconte ici sa déportation dans le camp d'Auschwitz-Monowitz en 1944.
Il est important de souligner que Primo Levi raconte seulement ce qu'il a vécu lors de sa détention dans le camps, sans trop s'attarder sur les histoires des autres prisonniers ou en rajoutant des éléments dont il a pu prendre conscience suite à sa libération.
En effet, il évoque les sélections pour les chambres à gaz, sans jamais vraiment en expliquer le fonctionnement car il ne l'a pas vécu, et ce livre retrace seulement ce qu'il a vécu.
Il n'écrit pas ce livre pour les autres, il ne fait pas de sensationnel, il raconte sa vérité. Son atroce, son abominable vérité.
Il écrit d'abord ce livre pour lui, pour se libérer de ces pensées, ce livre est son exutoire Et ça se sent dès le début. Il aurait eu un carnet où il écrirait au jour le jour ce qu'il vivait, le livre n'en aurait pas été si différent à mon sens.
Et c'est là le génie de Primo Levi. Il n'essaye de pas de transmettre une haine pour les Nazis, pour les SS, car ce livre est dépourvu de haine, dépourvu de sensationnalisme.

Bien sûr, son récit est effroyable. Et quand je dis effroyable c'est encore bien mince comparé à ce que l'on peut ressentir en lisant ces lignes.
Cependant son récit est utile voire indispensable, j'espère qu'il est encore donné en lecture aux collégiens et aux lycéens, car même si leurs bagages pour comprendre et digérer ce livre sont encore bien minces, il me semble important de montrer la vérité sans fioritures et sans superflu comme on peut le voir dans certains films.

Mon petit bémol sont pour les quelques mots allemands non traduits. Peut-être que mon édition est un peu vieille, je sais qu'elle a été rééditée depuis, mais parfois certains mots n'étaient pas traduits en bas de pages ni expliqués par l'auteur, ce qui gênait un peu ma compréhension immédiate du passage. Que du détail cela-dit !

Foncez. Lisez-le, relisez-le, offrez-le.

J'ai beaucoup aimé ce passage : "Enfermez des milliers d'individus entre des barbelés, sans distinction d'âge, de condition sociale, d'origine, de langue,  de  culture  et  de  mœurs,  et  soumettez-les  à  un mode  de  vie  uniforme,  contrôlable,  identique  pour  tous et inférieur à tous les besoins : vous aurez là ce qu'il peut y 
avoir de plus rigoureux comme champ d'expérimentation, pour déterminer ce qu'il y a d'inné et ce  qu'il  y  a  d'acquis  dans  le  comportement  de  l'homme confronté à la lutte pour la vie."


Mon exemplaire était aux éditions Pocket.

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